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Focus sur les périodiques de la bibliothèque de l’American mathematical Society (AMS) 

Rédigé par Samson Duran et Simon Carrignon

Introduction

David Eugene Smith (1860-1944) est un acteur bien connu de l’histoire des mathématiques étatsuniennes. Ses nombreuses activités professionnelles ont donné lieu à des analyses historiques variées[1]. Dans ce focus, nous nous concentrerons sur un de ses projets professionnels, à savoir son mandat comme bibliothécaire principal de l’American Mathematical Society (AMS) de 1902 à 1920. Notre travail concernera principalement le corpus des 10 volumes du catalogue pour la bibliothèque de l’AMS, mis en place par Smith lors de son mandat. Ces volumes furent publiés de 1903 à 1913 dans le Bulletin de l’AMS, le périodique distribué aux membres de la société et qui regroupe aussi des articles mathématiques, des recensions d’ouvrages mathématiques et de nombreuses informations sur l’AMS.

David Eugene Smith pris en photo en 1935 (par Leo Mielziner), il a alors 75 ans.

En 1914, un incendie dans les locaux de l’AMS est mentionné dans le Bulletin. Ce texte fait état d’une disparition dans les flammes de nombreux documents, dont la totalité des exemplaires des 10 premiers numéros du BAMS ainsi que les copies des registres annuels et des catalogues de la bibliothèque[2]. Il s’agit probablement d’un coup d’arrêt pour l’entreprise difficile d’édition du catalogue, menée depuis 10 ans par D. E. Smith. En tout les cas, aucun autre volume de catalogue ne sera ensuite édité pendant le reste mandat jusqu’en 1920.

L’étude des bibliothèques est l’un des points d’ancrage du projet PatriMaths. En effet, leur analyse historique permet de comprendre une patrimonialisation procédant par sélection et accumulation de textes mathématiques, dans un but de conservation sur le temps long. Dans notre cas, une petite étude des 10 catalogues existant sur la période — et plus particulièrement l’analyse quantitative de l’acquisition des journaux de l’AMS — nous permettra de comprendre certains aspects de ce procédé spécifiques de la patrimonialisation. Nous chercherons à mettre en lumière quelques aspects du fonctionnement de la bibliothèque sous le mandat de D. E. Smith en nous posant les questions suivantes : quels sont les journaux reçus par l’AMS pour sa bibliothèque, comment sont-ils acquis, quelle est leur provenance, dans quelle mesure les collections sont-elles complètes et enfin comment ce bibliothécaire rend-il compte de son travail auprès des membres de la société ?

Nous ne reviendrons pas sur le parcours personnel ou professionnel de D. E. Smith dans ce focus[3]. Rappelons simplement quelques éléments de son parcours à l’AMS, où il est l’un des membres ayant le plus de pouvoir institutionnel. Ce dernier occupe en effet de nombreux postes du conseil de la société (avec 45 annuités de mandatures accumulées entre 1902 et 1922) et est l’un des principaux contributeur du BAMS (avec 62 recensions sur ces 20 années de 1902 à 1922). Smith fut ainsi l’un des membres possédant le plus de pouvoir à l’AMS de son vivant, et fut aussi une figure officiellement mise en exergue après sa mort, le plaçant comme l’un des membres jugés les plus importants par la société pour ses 50 premières années.

En plus de ce travail d’édition et d'écriture, D. E. Smith est donc bibliothécaire de l’AMS, jusqu’en 1920, date où il devient président de la jeune Mathematical Association of America[4] . R. C. Archibald, son successeur comme bibliothécaire de la société dès 1921, écrit à propos de ce dernier :

« Another resignation at the close of 1920 was that of Professor Smith, who had been librarian for nineteen years. The library's present excellence is almost wholly due to him. When he entered upon his office the total number of volumes was only 121, and 64 periodicals were received by exchange ; but upon his retirement, the total tale was 5862 volumes, and 123 exchanges. »[5]

Une citation qui sera reprise régulièrement, comme dans l’article nécrologique proposé par l’AMS après la mort de Smith, en 1945[6].

La bibliothèque de l’AMS

La bibliothèque de l’AMS existe à partir de 1890, le poste de bibliothécaire de l’AMS est ensuite créé en 1894. Quelques informations dans les rapports annuels de la société ou les comptes-rendus de la rencontre de fin d’année nous apprennent que la bibliothèque contient alors principalement des volumes de journaux en échange avec ceux de l’AMS, mais ne sont pas accessibles aux membres. Les documents de la bibliothèque sont conservés par les bibliothécaires, probablement dans les locaux de l’AMS à New-York. À partir d’octobre 1901, dans le but de rendre les documents disponibles pour les membres, l’AMS et la Columbia University se mettent d’accord pour que cette dernière héberge officiellement la bibliothèque de l’AMS (comme collection spéciale dans la bibliothèque de l’Université). La même année, D. E. Smith est employé comme enseignant de mathématiques dans ce même établissement et est nommé bibliothécaire de l’AMS, en décembre, lors de la réunion annuelle de la société. À cette occasion, il est aussi décidé qu’un ensemble de règles d’usages sera établi pour la bibliothèque, ainsi qu’un catalogue. Les règles en question seront publiées chaque année du mandat de D. E. Smith, elles concernent l’emprunt sur place ou par courrier postal. Il est donc possible d’emprunter à distance, les frais sont à la charge des membres. La durée d’emprunt est par défaut de 4 mois, mais peut-être prolongée en écrivant à l’AMS. Notons aussi qu’aucune information n’est donnée dans ces rapports sur la vie de la bibliothèque, ou simplement sur la fréquentation de la bibliothèque, le nombre de demandes de prêt, etc. Seule cette mention est faite dans son premier rapport, en 1902 :

« Les membres de la Société ont beaucoup utilisé la bibliothèque, mais il est raisonnable de s'attendre à ce que le nombre de prêts augmente considérablement à la suite de la publication du catalogue annexé à ce rapport. » (Je traduis)

Chaque registre annuel de 1903 à 1913 contient un document intitulé rapport du bibliothécaire[7].  Ces rapports sont pour D. E. Smith l’occasion de donner quelques informations sur la bibliothèque, mais aussi de faire passer des messages aux membres de la société. Les rapports contiennent d’abord les informations sur le nombre de volumes détenus, en comptant séparément les volumes de périodiques et ceux de non-périodiques. Dès sa première année de fonction, Smith participe à l’acquisition de nombreux documents (663 volumes de journaux et 159 ouvrages) et augmente la liste d’échange de 64 à 116 périodiques, pour la suite de son mandat, cette source permet de donner un aperçu global du nombre d’acquisitions[8] :

 

Focus Samson 1

Au-delà du nombre total d’acquisitions cumulées, rappelé dans les nécrologies de l’auteur, ces courbes montrent un effort régulier et à peu près linéaire d’acquisition de documents sur la période

Ces rapports concernent parfois trois autres sujets : la question des fonds nécessaires à la reliure des journaux et des thèses étatsuniennes envoyées par les membres, des appels aux dons de volumes de périodiques et enfin des précisions sur les acquisitions effectuées.

Sur le premier thème, Smith se plaint régulièrement de ne pas avoir l’argent nécessaire pour relier les documents et les rendre accessibles au public. Ce sujet est réglé en 1912, lorsque Smith annonce que les leurs coûts, habituellement pris en charge par la Columbia University qui accueille la bibliothèque (comme le signifiait le contrat fait en 1901) seront totalement complétés par l’AMS. Cela représente une hausse conséquente des frais liés à la bibliothèque, les dépenses dédiées à la bibliothèque pour les années atteindront ainsi plus de 250$ en 1913 :

 

Pour se donner une idée de ce que cela représente, en1913, par rapport aux budgets généraux de l’AMS, les dépenses totales deux années sont d’environ 6 700$, tandis que les entrées d’argents sont d’environ 15 000$. Les dépenses liées à la bibliothèque sont ainsi le quatrième poste de dépense respectivement pour cette année exceptionnellement couteuse en reliure[9]. Cependant, notons que ce poste ne représente que 1/27ᵉ des dépenses totales.

Le deuxième point abordé dans les rapports du bibliothécaire, l’appel aux dons, est répété quasi systématiquement. Parfois des volumes spécifiques sont demandés, il s’agit alors de volumes de journaux nécessaires pour compléter des acquisitions lacunaires. Ces lacunes seront parfois comblées, grâce au troisième point.

Le troisième point concerne en effet les acquisitions effectuées, il nous permet de comprendre le fonctionnement de quelques-unes. En effet, trois personnes sont mentionnées par Smith pour leurs dons de périodiques, il s’agit de E. McClintock, G. H. Hill et C. B. Upton[10] . Les deux premiers sont des anciens présidents de l’AMS (respectivement en 1892-1894 et 1895-1896) tandis que le dernier est l’assistant-bibliothécaire de Smith. Le premier fait un don de 500 volumes de périodique, traités et manuels, dont les détails ne sont pas donnés. Le deuxième donne une centaine de volumes de périodiques européens, une première fois en 1904 et une deuxième centaine en 1912. Quant au troisième, Smith indique seulement qu’il a permis de compléter la collection du Journal de l’école polytechnique, mais n’indique pas la quantité de volumes donnés.

 

À suivre :
La seconde partie de cet article sera bientôt publiée sur ce site,
elle aura pour but de proposer des analyses quantitatives
des journaux détenus dans la bibliothèque de l’AMS. 

 

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